Ce train nazi qui obsède les chercheurs de trésors

Une légende tenace

Depuis qu’ils sillonnent la terre des hommes, les trains convoient leur lot de légendes, comme à Madrid ou à Paris. Dans la ville polonaise de Walbrzych, celles-ci prennent la forme d’un trésor faramineux, fait d’or, de bijoux et d’armes de guerre, voire de produits dangereux selon certaines versions. Depuis la fin des années 1940, il se raconte en effet que, face à l’arrivée de l’Armée rouge dans la région, les dignitaires nazis auraient réuni une véritable fortune dans un train blindé qu’ils auraient ensuite cachée dans un réseau de tunnels militaires de la région. 

Si cette légende perdure, c’est pour deux raisons. La première, c’est qu’elle fait écho à des faits avérés, notamment l’existence d’un train rempli d’objets précieux spoliés aux familles juives de Budapest ayant traversé la Hongrie en 1942. De la même manière, en 1944, un train au départ de Bobigny a été rempli d’œuvres d’art par les Allemands avant d’être arrêté par la Résistance française. La seconde raison c’est que “plus c’est gros, plus ça passe”. Selon des rumeurs concordantes, ce sont environ 300 tonnes d’or en lingots qui seraient cachées dans ce tortillard. Une fortune colossale, facile à transporter et à réinjecter dans le système financier légal. Bref, le rêve de tous les chercheurs de trésor. 

Ce sont d’ailleurs deux d’entre eux, l’Allemand Andreas Richter et le Polonais Piotr Koper, qui remettent cette rumeur au goût du jour en 2015. A l’époque, les deux hommes affirment en effet dans les médias qu’ils ont localisé le fameux train, caché dans un réseau de tunnels construits dans le coin par le IIIe Reich. Appelé Riese (“géant” en Allemand), ce dernier devait accueillir un quartier général de l’armée du Führer mais n’a jamais pu être terminé complètement. Il en reste donc des grandes jonctions qui n’ont jamais été explorées. 

Lorsque ces déclarations sont publiées dans la presse internationale, elles alertent immédiatement tous les chercheurs de trésors de la planète. Mais pas que. Les autorités polonaises se mettent aussi en branle, des historiens et des géologues sont immédiatement mandatés pour évaluer la crédibilité de cette localisation. L’armée, la police, les pompiers sont également mobilisés pour gérer la situation. Des avocats s’occupent quant à eux de prévoir le scénario juridique auquel devrait faire face la Pologne si un tel train était découvert. 

La première désillusion arrive par les historiens. Plusieurs spécialistes locaux et internationaux affirment qu’aucun document évoquant l’existence de ce train n’ont été découverts et son existence s’avère donc improbable. Or, si les nazis cultivaient volontiers le secret, ils avaient aussi tendance à garder des traces de leurs plans, mêmes les plus confidentiels. Qu’importe, il faut bien plus qu’une absence de preuve en bonne et due forme pour décourager de vrais chercheurs de trésors comme Andreas Richter et Piotr Koper. 

Le deuxième coup dur prend la forme d’un rapport produit par les équipes d’un grand professeur de géologie polonais. Celui-ci affirme être sûr à 100% qu’il n’y a pas de train enterré ou caché dans la zone désignée par les deux Indiana Jones en puissance. Il reconnaît toutefois que des anomalies dans le terrain pourraient s’expliquer par la présence des fameux tunnels construits pour l’armée allemande. Après tout, les nazis auraient pu vider le train et dissimuler leurs trésors directement dans des cavités souterraines. Le chasse continue donc. 

Le 24 août 2016, Andreas Richter et Piotr Koper mettent eux-mêmes fin à leur version de la légende du train rempli d’or. Ils reconnaissent publiquement que ce qu’ils pensaient être sa cachette s’avère être une cavité créée en des temps immémoriaux par la présence d’un iceberg. On savait que ces géants de glace pouvaient faire sombrer des bâteaux mais pas qu’ils avaient le pouvoir de faire disparaître des trains remplis de trésors. C’est désormais chose faite. 

Le véritable drame de cette légende est pourtant tout autre. Depuis que les deux illuminés l’avaient faite ressurgir, elle avait attiré de nombreux touristes curieux ou ambitieux dans la région de Walbrzych et avait offert un petit essor économique à cette ville largement sinistrée par la fermeture de cinq des usines qui la faisaient vivre. Depuis le “débunkage” de cette histoire, la petite ville est retombée dans l’oubli et la pauvreté. Aussi immatérielles soient-elles, les légendes font parfois des victimes…

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