Les légendes du métro de Madrid

Quand les rails inspirent des récits à frémir debout

Créer une nouvelle mythologie ferroviaire, c’est ce que nous avons à cœur de faire en lançant notre compagnie d’hôtels sur rails, dans le but de réinventer le concept du train de nuit, ce produit vieux de plus d’un siècle. La mythologie, de quelque nature qu’elle soit, c’est cette idée qu’un ensemble de récits peut aider chacun à se projeter dans un avenir désirable où ses actions et décisions lui permettront de jouer un rôle majeur.

Bien souvent pourtant, la frontière entre mythologie et croyances peut être ténue en cela que les mythes, usant parfois du surnaturel parmi leurs ressorts de narration, finissent par être retenus davantage pour le récit merveilleux ou effarant qu’ils représentent que pour les enseignements profonds qu’ils nous dispensent, l’air de rien. De la mythologie au fantas(ti)que, il n’y a dès lors qu’un pas.

Ou qu’une ligne, à l’instar des légendes urbaines les plus alambiquées du métro madrilène. Parfois sources d’épouvante à peu de frais, toutes ont en commun de raconter quelque chose d’incroyable, qui ne deviendrait possible qu’à l’entrée dans l’univers souterrain où jaillit la bête humaine ferroviaire. Pour le coup, le réseau métropolitain de Madrid, le septième plus grand au monde avec ses 294 km de voies ferrées, offre un terrain de jeu avec peu de pareil à l’imaginaire. Jugez plutôt.

L’une de ces histoires prend racine à la station Santiago Bernabéu, qui permet de se rendre au stade mythique du Real Madrid…ou à des lieues de là. Longtemps, cette station porta en réalité le nom de Lima, et accrochez-vous bien, on raconte que ce ne serait pas le fait du hasard. La légende maintient en effet que des ouvriers qui travaillaient dans la station, empruntèrent un tunnel où ils se perdirent jusqu’à trouver une sortie et ressortir finalement…en pleine rue de la capitale péruvienne. Rien que ça. On préférera retenir l’hypothèse plus terre-à-terre que bel et bien perdus, la sortie les fit néanmoins émerger en pleine place de Lima, à Madrid, située à deux pas de la station en question !

Jusque là, on faisait dans la mignonnerie cardinalement déjantée. Dans un genre autrement plus paranormal, la légende la plus connue est sans doute celle de la station Tirso de Molina, construite non loin du quartier de La Latina. Si l’on en croit un récit persistant, les restes des moines d’un ancien couvent auraient été retrouvés lors de la construction de l'arrêt dans les années 1920. Les ouvriers, ne sachant pas trop quoi faire face à cette découverte macabre, auraient alors décidé de les ensevelir une seconde fois, sous les quais. Ce sacrilège expliquerait pourquoi depuis lors, il arriverait d’entendre des gémissements dans cette station à minuit, cette heure résolument fatidique.

Avec les récits suivants, on verse définitivement dans des histoires empruntant aux contes d’antan, appliqués à un univers nouvellement urbain. Et c’est toujours à Tirso de Molina - décidément on l’évitera celle-là - qu’elle se déroule. Une jeune femme y aurait pris le dernier train de la ligne 1. Se pensant seule dans la voiture, elle regarde autour d’elle quand elle découvre que trois autres passagers sont en réalité installés, à quelques sièges d’elle : une femme qui la regarde fixement, en compagnie de deux hommes à l'air étrange. A l’arrêt suivant, un homme monte, prend place à côté de la jeune femme et lui intime discrètement : "ne bouge pas, ne parle pas, ne regarde pas son visage, et descends avec moi au prochain arrêt". Ce qu’elle fit jusqu’à ce qu’une fois sur le quai, l'homme lui assura que la femme devant eux était morte, accompagnée par deux esprits. Si même les corps célestes prennent les transports en commun, ça devient coton !

Niveau esprits, il n’y a d’ailleurs pas que la ligne 1 du métro madrilène qui serait hantée. Une autre légende recommande d’éviter la ligne 5 ou du moins, de prendre ses précautions. En effet, si vous vous trouvez dans l'une des stations de cette ligne et que vous laissez passer neuf trains, le dixième qui arriverait alors, serait un train maudit, une sorte de Hollandais volant version métropolitaine, à bord duquel résonneraient bruits et cris terrifiants, d’une origine d’outre-tombe. Si vous avez du temps à perdre en regardant passer les trains…

Sans nul doute, le métro de Madrid n’a pas son pareil pour fasciner celles et ceux qui aiment à croire - ou du moins à raconter - ces histoires à frémir debout. Et si au-delà de leur folklore ferroviaire, elles disent beaucoup du besoin de l’être humain de jouer à se faire peur, sans doute existent-elles pour lui éviter de regarder en face des peurs autrement plus réelles.

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