In Bed With Umberto Napolitano

Chaque semaine, Midnight Trains accueille un invité ou une invitée à bord de l’un de ses hôtels sur rails pour explorer son rapport à la nuit. Cette semaine, c’est l’architecte italien Umberto Napolitano qui nous accompagne dans l’intimité chaleureuse et confortable de notre train de nuit.


Pour Umberto Napolitano, la beauté n’a rien de monolithique. Elle se décline au contraire dans les nombreuses formes d’art dont il se nourrit lui-même en permanence — musique, littérature, arts plastiques, design et autres — et dont la complexité lumineuse se retrouve dans son travail. Formé en France et en Italie, cofondateur avec Benoît Jallon de l’agence de renommée internationale LAN, il s’applique aussi à transmettre son savoir en écrivant et en enseignant. Nous sommes heureux d'accueillir ce soir Umberto à bord de Midnight


A quoi ressemble votre nuit idéale ?

Pendant des années, ma définition de la nuit idéale était une nuit pendant laquelle je ne dormais pas. Elle se serait probablement caractérisée par un ensemble d’actions et de lieux très divers concentrés dans un laps de temps se déroulant entre le dîner et le déjeuner du jour suivant, peu importe la saison.


Cette nuit aurait pu commencer dans un bon restaurant et se serait poursuivie avec une soirée chez quelqu’un (de préférence chez un hôte que je ne connais pas), puis dans un club et éventuellement dans un autre, pour revenir in fine dans un appartement ou un hôtel. J’aurais sûrement préféré démarrer la soirée seul et me retrouver le jour d’après en compagnie de quelqu’un avec qui passer la matinée et, pourquoi pas, le déjeuner. Le décor idéal aurait été celui d’une ville que je ne connais que peu, dans laquelle l’anonymat aurait amplifié le sentiment de liberté.


Mais ça, c’était avant. Aujourd’hui, depuis que j’ai un fils, ma nuit idéale est devenue une bonne nuit de repos, une nuit où je peux dormir douze heures d’affilée sans être réveillé en sursaut par des pleurs, des cris ou des « papa, on est réveillés » à 6h du matin.


Avec qui aimeriez-vous passer la nuit à bord de Midnight Trains ?

Si je peux réanimer des personnes décédées, je crois que je me ferais le plaisir de passer une nuit de voyage avec Italo Calvino. D’une part, parce que Les Villes invisibles, la trilogie Nos ancêtres, Si par une nuit d'hiver un voyageur et Leçons Américaines ont été des livres qui ont marqué profondément mon parcours. D’autre part, parce que comme l’affirmait Roland Barthes, Calvino avait une sensibilité, une humanité, une bonté et « une ironie qui n’est jamais blessante, jamais agressive, une distance, un sourire, une sympathie. » Avec Calvino, je suis sûr que j’aurais pu passer une nuit à apprendre tout en m’amusant.


Quel est votre plus beau souvenir de train de nuit ?

Les trains de nuit m’évoquent mes premières années à Paris. Je suis arrivé en 1996 et les compagnies aériennes low cost n’étaient pas encore très développées en Europe. Les jeunes prenaient tous le Palatino (Paris – Rome) pour aller en Italie. C’est ce que je faisais chaque fois que je rentrais visiter ma famille. C’était un voyage extraordinaire : on dormait très peu, on finissait toujours par rencontrer quelqu’un d’intéressant et, surtout, on apprenait à regarder le paysage se transformer sous nos yeux : Paris, Lyon, les Alpes, Turin, Gênes, la côte ligure, la Toscane, le Latium, un enchaînement d’images, de lumières, de langues et de dialectes.

Il y avait beaucoup de promiscuité, nous nous mélangions vraiment : les places étaient aléatoires et, dans un wagon de six places, les classes sociales, les âges, les origines, les sexes et les cultures se côtoyaient allègrement.


C’étaient toujours des expériences hautes en couleur : je me souviens que lors d’un de ces trajets avec ma copine de l’époque, qui était d’origine finlandaise, nous partagions la cabine avec une vieille dame qui avait des troubles digestifs et son mari qui ronflait comme un tracteur. Le choc des cultures et douze heures de fou rire.


Quelle musique aimeriez-vous écouter à bord de Midnight Trains ?

Personnellement, je trouve que les musiques de fond nuisent à toute expérience, on finit par ne plus rien écouter. Plutôt qu’une playlist ou une soundtrack, je préfère donc donner un Top Five à la manière de Rob, le personnage de Nick Hornby dans le roman High Fidelity.


Voici donc mon Top Five « Night train » :

Night Train – Al Grey and Jimmy Forest – 1951

Night Train – James Brown & The famous Flames – 1961

Night Train – Wes Montgomery & Jimmy Smith - 1966

Night Train – Guns N’Roses – 1987

Night Train – Public Enemy - 1991

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